S07E07 Virtù

Virtù, c’est un jeu qui depuis sa sortie en fin d’année dernière (chez Super Meeple) taquine la programmation des Bob Games pour y faire une entrée fracassante en rentrée 2022… Et il a obtenu son ticket d’entrée et on y a joué !

Mais pourquoi votre humble serviteur était si enthousiaste ? Parce que Virtù est présenté comme un jeu expert, exigeant, mélangeant deckbuilding, roue d’actions et conquête de territoires, le tout sans aucune chance et avec un jeu totalement ouvert pour tous les joueurs ! Alors, vous êtes curieux ? Accrochez-vous alors…

Au début, il y eut Eru, le Premier, qu’en Arda on appelle Iluvatar. Mais cela n’a rien à voir avec le jeu. Non. C’est plutôt la fin d’un temps, celui du Moyen-Âge, et le début d’un autre plus moderne, celui de la Renaissance italienne. Nous représentons une grande Famille de l’Italie d’alors, gouvernant 2 cités. Mais cela ne nous suffit plus. Nous en voulons plus. Toujours plus. Et il ne peut en rester qu’un !

Sauf que là aussi, on est hors-sujet, quoique…

Mais alors, on fait quoi ? Simple. On joue sur une année qui ne comporte ni été ni automne. Oui, au temps de la renaissance on préfère les bourgeons de la belle saison et le froid. Le reste n’existe pas. Le plateau du joueur représente le palais de la Grande famille. Au centre, la roue d’actions avec 5 cases prédéterminées. Sur les côtés, 6 emplacements de courtisans dont 3 sont débloqués en début de partie. La roue d’actions est le cœur du jeu, à savoir que c’est là où vous déplacerez votre marqueur principal et pourrez accomplir une action. Les courtisans, c’est le 2ème cœur du jeu car c’est là où vous pourrez placer vos courtisans, comprenez par-là les précieuses cartes (n’oubliez pas, c’est un deckbuilding) qui comportent des ressources permettant l’achat de nouvelles cartes ou tuiles fantastiques ou encore récolter des impôts et remplir les coffres du palais de florins (l’argent du jeu). Important, une carte utilisée doit être retournée et n’est plus utilisable jusqu’à ce que vous l’ayez retournée et tournant sur votre roue d’actions (oui, c’est comme ça).

La roue d’actions revisitée… désolé… je sors…

Le jeu comporte donc des cartes « courtisans » mais également des cartes « bonus de patronage » (qui donnent des avantages non négligeables en cours de partie ou donnent des points de victoire en fin de partie). Mais également des tuiles de cités (qui sont donnent des ressources comme un courtisan sauf que pour le retourner il faut « gouverner » la cité… vous comprendrez plus tard). Mais également des tuiles « titres », « guildes », « cathédrale » et « personnelles de famille que personne d’autre ne peut utiliser ». Bien évidemment, tout cela s’achète en cours de partie. Au début, à part la blague récurrente, vous commencez uniquement avec 3 membres de votre famille, apparenté à des courtisans dans leur utilisation (et un malheureux florin).

Le palais de Venise, ça ressemble à ça

Vous suivez toujours ou vous avez déjà abandonné ? Bon, si vous avez abandonné, vous ne lirez jamais ce texte. Pour les autres, petite vidéo bonus de Chaps, un « explicateur » de règles sur le net qui est vraiment très bon (rapide, concis et qui ne perd pas de temps à expliquer des trucs inutiles).

Bon, la vidéo est longue quand même, alors vous pouvez continuer ici… A son tour, au printemps, on choisit une action sur notre roue d’actions en avançant le pion d’une ou 2 cases. On peut avancer plus mais il faudra alors débourser des florins ou utiliser une tuile le permettant. On résout ensuite l’action et tout le monde fait pareil. Ensuite, on résout les éventuels sièges militaires (et oui, ce n’est pas un jeu gentil). Ensuite, on détermine le nouvel ordre du tour en commençant par celui qui a le plus de cités sous son contrôle. Et le printemps se termine ainsi. Pendant l’été inexistant, on boit des Spritz et on se tape sur le ventre en chantant la bella vita.

Pour les connaisseurs, vous reconnaîtrez il Duomo de Florence

A l’automne, également inexistant, on fait un peu d’exercice pour perdre les kilos pris pendant l’été. Arrive l’hiver et là, soudain, c’est le drame… il faut payer la solde des soldats (ouille)… mais c’est également le moment de réorganiser son palais (étape très importante), de faire des achats de cartes et tuiles et de forger des alliances (hein, c’est quoi les alliances ?? vous avez qu’à lire les règles ou regarder la vidéo de Chaps, on ne va pas tout vous expliquer non plus).

Le nord de l’Italie, c’est bondé et agité comme pendant la fête à la saucisse

Voilà, il reste encore à vous expliquer les 6 actions et on peut démarrer (quoi ?! ce ne sera pas fini après tout ce charabia ? Non…) :
1. Gouverner : ou comment retourner jusqu’à 2 tuiles pour récupérer des ressources
2. Patronner : ou comment claquer son fric dans des causes inutiles mais néanmoins juteuses
3. Commercer : ou comment utiliser ses bateaux pour se faire de l’argent
4. Annexer : ou comment faire la guerre avec un Spritz à la main
5. Guerroyer : ou comment faire comprendre après que le Spritz n’ait rien donné
6. Intriguer : ou comment faire de Varys un petit joueur

La partie s’arrête lorsqu’un joueur possède 8 cités ou lorsque la piste de patronage est terminée. On fait un petit décompte de points (ce n’est pas une salade ici) et le vainqueur est proclamé. Youpie. Bravo.

Un personnage de base de Venise (le commerçant) positionné dans le palais

Bon, ce soir-là, ils furent 4. Un nouveau venu, Stéphane (pour ceux qui suivent ce blog, ils commencent franchement à nous pomper ces Stéphane et dérivés… à croire qu’ils se reproduisent), Minh l’inéluctable, Stefano (encore un…) et Bob. Après s’être réparti les Cités de départ, chacun commence à réfléchir. Et, premier constat, c’est long. On est clairement dans un jeu où le hasard n’existe pas (joueur du jeu de l’oie, fuyez maintenant !!). Tous les jeux des joueurs sont posés visibles sur la table. Tout est anticipable. Tout est réfléchis. Tout est long… Cette partie a duré 6 heures avec les règles !!!! Bon, ok, c’est une première partie. Bon, ok, il faut appréhender le jeu et le comprendre. Mais quand même.

Analysis Paralysis

Le premier constat sur la table, c’est que Naples (Minh, en jaune, comme d’habitude) est bien esseulé là-bas en bas, au sud de l’Italie. Ils ont une capacité d’envahir assez enviable, par rapport à des Milanais (Stefano) complètement coincé entre Venise (Bob) et Florence (Stéphane, l’autre… enfin vous avez compris que ce n’est pas le même que d’habitude). Deuxième constat, il y a clairement 3 cartes de patronage qui sont « cheatées » (à savoir qui semblent trop fortes) : une qui empêche les agents des autres joueurs de vous embêter (c’est l’action Intriguer) et c’est balèse, une autre qui vous donne +2 en défense tout le temps (et c’est dissuasif) et une autre qui vous donne un personnage avec 2 couronnes (ça ne semble rien mais en combo sur Annexer, ça fait mal). Du coup, les joueurs se sont rués sur les actions de Patronner et on imagine mal des parties se dérouler autrement tellement ces avantages sont puissants.

Venise (en vert) est descendu au sud grace à ses bateaux

Troisième constat, les déplacements sont chers. Déplacer des armées prend du temps (on ne peut le faire que sur l’action Guerroyer et il faut un petit cheval pour chaque armée et pour un seul déplacement). Du coup, Venise et ses bateaux deviennent intéressants mais encore faut-il le comprendre en première partie… et Bob ne l’a pas forcément compris (bien qu’il ait pris Messine assez rapidement). Quatrième constat, Intriguer est vraiment très puissant pour soi et nuisible pour les autres joueurs. On peut, grace à un agent, diminuer la force d’une ville en mode guerre ou en mode annexation. On peut, grace à un agent, augmenter la force d’une ville visée par un autre joueur pour lui ruiner ses plans. On peut également empêcher un joueur (et c’est là que l’agent est vraiment surpuissant et que la carte cheatée citée plus haut prend tout son sens) de faire une action sur sa roue d’actions !!!! Et pour enlever cet agent, il faut aller sur sa propre action Intriguer et donc cela prend du temps. Potentiellement, si les autres joueurs veulent vous bloquer, ils peuvent vous pourrir la partie très facilement. Cinquième constat, il ne faut clairement pas être des Bisounours… Non. Il faut dès le départ utiliser ses capacités de nuisances pour ralentir les autres et s’octroyer des avantages. Les 4 joueurs ont été timides et chacun s’est au départ focalisé sur son propre jeu. Erreur. Mais en même temps, peut-il en être différemment lors d’une première partie ?

C’est pas un jeu pour Bisounours

Sixième constat, c’est un DECKBUILDING ! Malgré les apparences trompeuses, ce n’est que ça. Bob et Stéphane ne l’ont pas compris (du coup, imaginez bien qu’ils terminent derniers ces 2 là), alors que Stefano et Minh l’ont clairement compris. Il faut acheter de bonnes cartes avec de précieuses ressources. Il faut les positionner stratégiquement dans son palais et les faire « fonctionner » le plus souvent possible. Il faut construire des tuiles annexes qui donnent plus d’opportunités de déplacements et d’achats. Il faut agrandir son palais pour accueillir plus de courtisans. Il faut aller chercher les petits points de victoire par-ci par-là car ils feront la différence à la fin. Bref, c’est un deckbuilding.

Ça c’est un palais bien géré ! bravo Stefano avec les Milanais

Septième constat, une guerre, ça se prépare. Entre recruter des soldats (et payer leur solde…), les déplacer et garder des cartes de guerre en réserve, cela peut prendre quelques tours pour capturer une ville d’envergure. Du coup, la carte cheatée de défense citée plus haut est vraiment dissuasive et, une fois de plus, ce sont les faibles qui trinquent du coup. Bob en a fait les frais avec Stefano d’abord et avec Minh ensuite. Stéphane était blindé avec sa défense et il en a profité pour capturer les petites villes neutres de la Toscane très librement. Huitième constat, ça reste aussi un jeu de contrôle de territoire… chaque Cité capturée vient avec sa tuile et ses ressources. Ce n’est pas négligeable car à la fin de la partie, chaque Cité apporte des points supplémentaires. Rester dans son coin peut ne pas suffire pour gagner.

Il n’y a pas beaucoup de matériel…

Neuvième constat, il faut se focaliser sur ce qui rapporte des points de victoire à la fin de la partie… Bien que Stéphane et Bob ont été nuls dans le deckbuilding, Bob a terminé à 12 points et Stéphane à 8 points. 4 points, dans ce jeu, c’est beaucoup. On peut perdre de vue l’essentiel dans ce genre de jeu et voici la liste de ce qui marque des points :
1. le contrôle des Cités (jusqu’à 7 points en jeu)
2. le Patronage (jusqu’à 4 points en jeu)
3. les cartes et les tuiles (plusieurs points à débusquer)
4. l’Influence religieuse (des points pour ceux qui ont le plus de symboles religieux, 4 au max)
5. le Prestige militaire (une victoire contre un joueur apporte un jeton qui vaut 2 points)
6. les Alliances (un maigre point par alliance mais c’est toujours ça)
7. les Indulgences (une sorte de crédit qui fait perdre des points)

Ça fait quand même un peu salade de points après réflexion.

La tuile de Cité de Venise

Dixième constat… et à la fin, c’est Minh qui gagne.

La Cathédrale de Rome, par Minh bien évidemment

La partie aurait pu s’arrêter plus vite si tout le monde avait compris que de laisser perdurer une partie mal emmanchée profite surtout aux riches, à savoir ceux qui disposent de ressources (et donc de cartes et de tuiles si vous avez bien tout lu). Que cela n’enlève rien aux mérites de Minh le Napolitain mais il a pu construire tranquille un Empire dont même les Romains seraient jaloux. Dernier tour, une cathédrale qui lui assure l’influence de l’Eglise et un point de victoire en plus). Il termine avec 24 (!) points. Suivi par un honorable mais timide Stefano avec 16 points (il a laissé des villes libres juste autour de lui… il aurait dû être plus conquérant). Bob donc à 12 points (mais pourquoi n’a-t-il pas compris que le commerce en début de partie lui donnerait beaucoup d’argent) et Stéphane à 8 points (bien trop caché derrière sa défense +2 pour voir au-delà de son palais alors que le Centre de l’Italie lui tendait les bras).

En cadeau bonus, les conseils de l’auteur pour bien débuter avec ses Cités

Un jeu plein de promesses. Un poil de déception. Un jeu où il faut faire des choix. Un jeu qui se mérite. Un jeu qui doit être joué. Un jeu avec aggression (sinon tu crèves). Un bon jeu. Un excellent jeu ? Réponse dans quelques parties.

Merci d’avoir lu jusque-là (et sans tricher).

Et à bientôt !

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